Evolution de prakriti – Glossaire simplifié de Samkhya

écrit par Pankaj Saini

Au coeur de Yoga est la philosophie de Samkhya (énumération de la manifestation de la réalité), qui nous explique comment le cosmos (et notre propre nature) s’est évolué. Mais prakriti (ce qui évolue, souvent traduit par “la Nature Primordiale”) n’est pas juste la matière et l’énergie. C’est aussi chaque expérience humaine, chaque émotion, chaque pensée, chaque ressenti que nous avons. 

Comprendre l’évolution de prakriti c’est comprendre intimement tout ce que nous vivons et tout ce que nous voyons. 

Dans cet article, faisons un glossaire simplifié des termes clefs de cette évolution. 

Pourquoi c’est important ?

Imaginez une dispute avec un proche. Les mots dépassent votre pensée, et après coup, vous vous sentez envahi(e) par des émotions comme la colère, la tristesse, ou même le regret. Pourquoi avez-vous réagi aussi vivement ? Pourquoi cette même situation pourrait-elle laisser quelqu’un d’autre totalement impassible ?

La réponse réside dans la manière dont prakriti (la nature subtile qui façonne notre être) interagit avec nos pensées, émotions et conditionnements passés (samskara). Nos réactions dans ces moments sont souvent le résultat de vieux schémas mentaux ou émotionnels qui refont surface. Par exemple, si par le passé vous avez ressenti un manque d’attention ou de compréhension, cette expérience s’est inscrite en vous et la moindre remarque perçue comme un rejet pourrait déclencher une réponse émotionnelle intense.

Comprendre comment prakriti, avec ses différents guna et samskara, évolue en nous, c’est être capable de mieux percevoir pourquoi nous réagissons de cette manière. C’est se donner la possibilité de décomposer la situation et de prendre du recul, plutôt que d’être automatiquement mené par nos conditionnements.

Purusha-Prakriti

Purusha et prakriti sont les deux concepts fondamentaux de la philosophie du Samkhya. Purusha (पुरुष, puruṣa) représente la conscience pure, immuable et éternelle, détachée du monde matériel. Le terme purusha est dérivé des racines sanskrites puru (पुरु, puru), qui signifie “grand” ou “ancien”, et asha (आश, āśa), signifiant “lumière” ou “ce qui brille”. Il désigne ainsi la “lumière ancienne” ou “le Soi primordial”, la conscience en nous qui observe sans agir.

Purusha et Prakriti : Les piliers de la philosophie de Yoga

Prakriti (प्रकृति, prakṛti), quant à elle, est la nature primordiale, la force créatrice qui évolue et transforme tout ce qui est tangible. Le terme prakriti vient des racines pra (प्र, pra), signifiant “en avant” ou “vers l’avant”, et kriti (कृति, kṛti), qui veut dire “faire”, “créer” ou “action”. Elle représente donc “ce qui est créé en progression”, l’énergie dynamique qui donne forme à l’univers matériel.

L’interaction entre purusha et prakriti est essentielle dans la philosophie de Samkhya. Purusha observe, tandis que prakriti agit, évolue et produit toutes les manifestations du monde, y compris nos pensées, émotions et actions. Tandis que prakriti est sujette aux changements constants, purusha demeure l’observateur inaltérable.

Comment prakriti évolue

L’évolution de prakriti est un processus complexe et dynamique qui commence à partir d’un état extrêmement subtil pour se manifester sous forme de la matière tangible que nous percevons. Ce processus suit une séquence spécifique, influencée par l’interaction des guna (les trois qualités de la nature), et se déroule en plusieurs étapes, chacune jouant un rôle clé dans la création de l’univers et de notre expérience humaine.

La première étape de cette évolution est la manifestation de mahat (महत्, mahat), ou buddhi (बुद्धि, buddhi), l’intellect supérieur qui apporte discernement et clarté. De mahat émerge ensuite ahamkara (अहंकार, ahaṁkāra), le principe de l’ego qui produit l’individualité. À partir de là, prakriti se divise en différents niveaux de création, incluant manas (le mental), les sens cognitifs (jnanendriya), les organes d’action (karmendriya), et les tanmatras (les cinq qualités subtiles).

Ces tanmatras se combinent ensuite pour créer les bhuta (les cinq éléments physiques), formant la base de tout ce qui est matériel dans l’univers. Ainsi, l’évolution de prakriti va du subtil à l’abstrait, pour aboutir au concret et au visible, tout en respectant un ordre précis qui se retrouve aussi bien dans l’univers cosmique que dans la constitution individuelle de chaque être.

Les 3 guna

Les guna (गुण, guṇa) sont les trois qualités fondamentales de la nature qui gouvernent toutes les manifestations de prakriti. Ils représentent les forces à l’origine de chaque pensée, émotion et action, influençant nos comportements et nos expériences de vie. Les guna sont sattva, rajas, et tamas :

Triguna : Pourquoi on rentre dans les cercles vicieux ?

  • Sattva (सत्त्व, sattva) : C’est la qualité de pureté, de clarté et d’harmonie. Sattva est associé à la lumière et à l’équilibre.
    Exemple : Imaginez un matin paisible où vous vous sentez en paix, avec un esprit clair et un corps léger. Vous ressentez de la joie sans raison particulière et votre esprit est calme, ouvert à la compréhension. C’est l’influence de sattva en vous.
  • Rajas (रजस्, rajas) : C’est la qualité de l’activité, du mouvement et du dynamisme. Rajas est l’énergie de la passion et du désir, mais il peut aussi provoquer agitation et instabilité.
    Exemple : Lorsque vous êtes rempli(e) d’énergie et que vous avez un élan d’action pour accomplir vos tâches, mais aussi lorsque vous vous sentez nerveux(se), impatient(e) ou submergé(e) par les pensées. Rajas est ce qui vous pousse à agir, à réagir et à rechercher des résultats.
  • Tamas (तमस्, tamas) : C’est la qualité de l’inertie, de l’obscurité et de la lourdeur. Tamas est l’énergie de la stagnation, de la confusion et de l’ignorance.
    Exemple : Quand vous vous sentez léthargique, démotivé(e) ou submergé(e) par des pensées négatives, c’est l’effet de tamas. C’est l’état dans lequel on se sent bloqué et lourd, avec peu d’envie de bouger ou de réfléchir.

Ces trois guna interagissent constamment, créant différents états mentaux et physiques. Sattva élève, rajas agite, et tamas alourdit. Comprendre leur influence aide à mieux observer et gérer nos états d’esprit au quotidien, en cultivant davantage de sattva pour atteindre un état d’équilibre et de clarté.

Samskara

Les samskara (संस्कार, saṁskāra) sont les empreintes subtiles laissées dans notre esprit par chaque pensée, parole et action que nous expérimentons. Ils représentent nos conditionnements profonds, façonnant nos réactions, comportements et perceptions. En sanskrit, sam (सम्, sam) signifie “ensemble” ou “complet”, et kara (कार, kāra) signifie “action” ou “faire”. Ainsi, samskara peut se traduire par “action répétée qui laisse une trace”.

Chaque expérience que nous vivons s’inscrit dans notre champ mental sous forme de samskara. Celles-ci peuvent être positives, comme des pensées d’amour et de générosité, ou négatives, comme des souvenirs de peur ou de rejet. Avec le temps, ces impressions créent des schémas qui influencent la manière dont nous voyons le monde et réagissons aux situations.

Exemple : Imaginons que vous ayez été souvent critiqué(e) pour votre travail dans le passé. Même si ces critiques ne sont plus présentes aujourd’hui, le souvenir de ces expériences (les samskara) peut vous amener à douter de vous-même, à ressentir de l’anxiété, ou à réagir avec défensive face à de nouvelles critiques, même constructives.

Les samskara se superposent à la lumière pure de purusha, modifiant la manière dont cette lumière se manifeste à travers prakriti. Ils forment ainsi des filtres colorés qui influencent chaque pensée et émotion. Pour avancer sur le chemin de Yoga, il est essentiel de reconnaître et de travailler sur ces samskara, afin de dissoudre les conditionnements qui nous limitent et de révéler notre véritable nature.

Tattva

Le terme tattva (तत्त्व, tattva) signifie littéralement “cela” ou “vérité” et désigne les principes fondamentaux de la réalité. En sanskrit, tat (तत्, tat) signifie “cela” (indiquant une essence ou une vérité universelle), et tva (त्व, tva) signifie “état” ou “nature”. Les tattva sont donc les éléments essentiels qui composent l’univers, à la fois visibles et invisibles, et qui permettent d’expliquer le fonctionnement de la création selon la philosophie de Samkhya.

Dans Samkhya, il existe 25 tattva qui constituent toutes les dimensions de la réalité, depuis les niveaux les plus subtils jusqu’à la matière physique. Ces tattva forment une hiérarchie qui commence par prakriti (la nature primordiale) et se termine par les cinq éléments matériels :

  1. Prakriti – La nature primordiale, la source de toute création.
  2. Mahat ou Buddhi – L’intellect supérieur.
  3. Ahamkara – L’ego.
  4. Manas – Le mental.
  5. Les 5 Jnanendriya – Les sens de perception.
  6. Les 5 Karmendriya – Les organes d’action.
  7. Les 5 Tanmatra – Les qualités subtiles.
  8. Les 5 Bhuta  Les éléments matériels.

Chaque tattva représente un principe ou une fonction spécifique qui interagit avec les autres pour créer l’expérience globale de la vie. Par exemple, mahat permet le discernement, tandis que ahamkara donne naissance au sentiment d’individualité. Les tanmatra fournissent les qualités subtiles nécessaires pour former les bhuta, qui sont les éléments matériels de l’univers.

Comprendre ces tattva aide à percevoir comment le monde extérieur (le corps, les objets) et le monde intérieur (les pensées, les émotions) sont reliés et structurés selon une hiérarchie subtile. C’est par l’étude de ces principes que nous pouvons naviguer entre les différents niveaux de notre expérience et progresser sur le chemin de la connaissance de soi.

Prana

Le terme prana (प्राण, prāṇa) signifie littéralement “souffle” ou “énergie vitale”. En sanskrit, pra (प्र, pra) signifie “vers l’avant” ou “avant”, et an (अन्, an) signifie “souffler” ou “respirer”. Cependant, prana ne désigne pas uniquement le souffle physique que nous respirons. Il représente la force vitale qui anime toute la création et qui permet à prakriti d’évoluer.

Dans la philosophie de Samkhya et de Yoga, prana est vu comme l’ombre de purusha (le Soi, la conscience pure) projetée sur prakriti (la nature primordiale). Il agit comme un pont entre le Soi immuable et la matière en perpétuelle transformation. C’est cette énergie fondamentale qui permet à prakriti de se manifester, d’évoluer, et de se structurer en toutes les formes et fonctions de l’univers. Sans prana, il n’y aurait ni mouvement, ni action, ni vie.

En pratiquant des techniques comme le pranayama, on cherche à équilibrer et harmoniser ces courants de prana pour restaurer le lien entre purusha et prakriti, et transcender les limitations de la matière pour atteindre un état de conscience supérieur.

Mahat ou buddhi

Mahat (महत्, mahat) ou buddhi (बुद्धि, buddhi) est le premier principe évolutif de prakriti et l’une des manifestations les plus subtiles de la création. Le terme mahat signifie “grand” ou “cosmique”, dérivé de la racine sanskrite maha (मह, maha) qui signifie “grand” ou “vaste”. Quant à buddhi, le terme vient de la racine budh (बुध्, budh), qui signifie “éveiller”, “discerner” ou “percevoir”. On peut aussi le traduire comme “le réservoir de discernement”. 

Mahat est souvent traduit comme l’intellect cosmique, et buddhi représente sa forme individuelle dans chaque être vivant. C’est le principe de discernement et de clarté qui permet de distinguer le vrai du faux, l’éphémère de l’éternel, et d’effectuer des choix conscients. Il est le réservoir de la sagesse et le siège du discernement (viveka), agissant comme le miroir qui reflète la lumière de purusha sur prakriti.

Ahamkara

Ahamkara (अहंकार, ahaṁkāra) est le principe de l’individualité, souvent traduit par “ego”. En sanskrit, aham (अहम्, aham) signifie “je” ou “moi”, et kara (कार, kāra) signifie “faire” ou “causer”. Littéralement, ahamkara se traduit par “celui qui fait le moi” ou “le faiseur du je”. C’est le processus qui engendre le sentiment de séparation et d’individualité, et qui nous permet de nous percevoir comme un être distinct des autres.

Dans l’évolution de prakriti, ahamkara émerge après mahat/buddhi. Tandis que mahat permet le discernement, ahamkara génère le sens du “je” et la perception de l’individualité. C’est ahamkara qui dit : “C’est moi qui ressens cela”, “C’est mon corps”, “C’est moi qui pense”. Il attribue les expériences à un soi personnel, créant ainsi l’identification avec les pensées, les émotions et les sensations.

Cependant, ahamkara n’est pas uniquement négatif. Sans lui, il serait impossible de fonctionner dans le monde. C’est ahamkara qui nous permet d’agir, de parler, de faire des choix en lien avec notre propre existence. C’est l’ego qui structure nos expériences, qui les rassemble et les interprète comme étant les nôtres.

Le rôle de ahamkara est donc double : il nous permet d’interagir avec le monde en tant qu’individus, mais il est aussi à l’origine de l’illusion de séparation avec le reste de la création. Dans la voie de Yoga, on cherche à comprendre et transcender ahamkara, pour voir au-delà de cette illusion de “moi” et percevoir la réalité d’un Soi plus vaste, qui ne se limite pas à l’individualité apparente.

Manas

Manas (मनस्, manas) est le principe du mental, celui qui collecte, organise et transmet les informations provenant de nos sens et de nos pensées. En sanskrit, manas est issu de la racine man (मन्, man), qui signifie “penser” ou “réfléchir”. Manas peut ainsi être compris comme “le mental qui pense” ou “le mental qui perçoit”.

Dans la hiérarchie de l’évolution de prakriti, manas se situe après ahamkara (l’ego). Il fonctionne comme le pont entre les sens (les jnanendriya) et les facultés supérieures de l’esprit, telles que buddhi (l’intellect) et ahamkara (le sentiment de “je”). Manas reçoit les impressions sensorielles (vue, ouïe, goût, etc.), les trie, et les envoie à buddhi et ahamkara pour être interprétées.

Exemple pratique : Lorsque vous entendez un bruit soudain, c’est manas qui capte cette information via le sens de l’ouïe. Il envoie ensuite cette impression à ahamkara (qui dira “j’ai entendu quelque chose”) et à buddhi (qui déterminera si le bruit est une menace ou non). Ce processus rapide et subtil est essentiel à notre survie et à notre interaction avec le monde.

Manas est également responsable de la pensée réactive et de la mémoire à court terme. Par exemple, si vous décidez de lever la main, c’est manas qui coordonne cette intention avec le mouvement physique, en envoyant les signaux nécessaires aux organes d’action (les karmendriya). Il est donc le médiateur entre ce que nous percevons et ce que nous faisons.

Cependant, manas est aussi sujet à la distraction et à l’agitation. Un manas déséquilibré entraîne la confusion, la sur-cogitation ou le vagabondage mental. C’est pourquoi, dans la pratique de Yoga, on cherche à stabiliser manas par la concentration et la méditation, pour qu’il puisse fonctionner comme un serviteur de buddhi et non comme un maître agité, permettant ainsi un accès plus direct à la clarté de la conscience (purusha).

Citta

Citta (चित्त, citta) est le terme utilisé pour désigner l’ensemble du champ du mental ou le “mental global” dans la philosophie de Samkhya et de Yoga. En sanskrit, citta provient de la racine cit (चित्, cit), qui signifie “conscience” ou “perception”. Citta regroupe les trois principaux composants de l’esprit : buddhi (l’intellect), ahamkara (l’ego) et manas (le mental), chacun jouant un rôle distinct dans le traitement des informations et des expériences.

Citta : Mieux comprendre notre mental

On peut voir citta comme un “champ du mental” où chaque pensée, émotion, impression sensorielle et souvenir est perçu, traité et stocké. Il agit comme le réceptacle de toutes les impressions de l’expérience humaine. C’est dans citta que les samskara (impressions subtiles) se déposent, formant les tendances, conditionnements et schémas mentaux qui influencent notre manière de percevoir le monde et d’y réagir.

Jnanendriya

Les jnanendriya (ज्ञानेन्द्रिय, jñānendriya) sont les cinq organes subtils de perception dans la philosophie de Samkhya et de Yoga. En sanskrit, jnana (ज्ञान, jñāna) signifie “connaissance” ou “savoir”, et indriya (इन्द्रिय, indriya) désigne “organe” ou “faculté”. Les jnanendriya sont donc littéralement les “organes de connaissance” ou les “sens subtils de perception”, qui permettent à l’esprit de recevoir des informations du monde extérieur.

Il est essentiel de distinguer les jnanendriya des organes physiques correspondants (comme les yeux ou les oreilles). Les jnanendriya ne sont pas des structures matérielles, mais des principes subtils. Par exemple, une personne aveugle a toujours le sens subtil de la vision, même si l’outil physique (les yeux) est endommagé ou manquant. De même, quelqu’un dont l’ouïe est altérée possède toujours le sens de l’audition. Les jnanendriya représentent donc la faculté intrinsèque de perception présente au niveau énergétique et subtil.

Les 5 jnanendriya et leur étymologie

  1. Chakshurindriya (l’organe de la vue)Chakshus (चक्षुस्, cakṣus) signifie “œil” ou “vue” et indriya (इन्द्रिय, indriya) signifie “organe”. La capacité de percevoir la forme énergétique d’un objet, intimement lié à l’élément du feu.
  1. Shravanendriya (l’organe de l’ouïe)Shravana (श्रवण, śravaṇa) signifie “écouter” ou “entendre”. La faculté de percevoir la vibration (et donc la nature primaire) d’un objet, lié à l’élément d’akasha
  2. Ghranendriya (l’organe de l’odorat)Ghrana (घ्राण, ghrāṇa) signifie “odorat” ou “sentir”. La capacité de percevoir odeur et la manifestation finale d’un objet, lié à l’élément de la terre. 
  3. Rasanendriya (l’organe du goût)Rasana (रसन, rasana) signifie “goût” ou “saveur”. La faculté de percevoir la saveur (essence) d’un objet, lié à l’élément de l’eau.
  4. Sparshanendriya (l’organe du toucher)Sparsha (स्पर्श, sparśa) signifie “toucher” ou “contact”. Le sens tactile qui permet de percevoir le mouvement d’un objet, lié à l’élément de l’air.

Karmendriya

Les karmendriya (कर्मेन्द्रिय, karmendriya) sont les cinq organes subtils d’action, responsables de l’expression de notre énergie dans le monde extérieur. En sanskrit, karma (कर्म, karma) signifie “action” et indriya (इन्द्रिय, indriya) signifie “organe”. Les karmendriya sont donc littéralement les “organes d’action”. Ils permettent à l’énergie de prakriti de se manifester sous forme d’actions physiques, comme parler, bouger, et accomplir des tâches.

Comme pour les jnanendriya (les organes de perception), il est important de distinguer les karmendriya des organes physiques. Les karmendriya ne sont pas des structures matérielles, mais des capacités subtiles présentes au niveau énergétique. Par exemple, la faculté d’action liée à la reproduction ne se limite pas uniquement aux organes reproductifs, mais même la reproduction d’une pensée/émotion est lié à ce même sens d’action. 

Les 5 karmendriya et leur étymologie

  1. Vagindriya (l’organe d’émettre la vibration)Vak (वाक्, vāk) signifie “parole” ou “parler” et indriya (इन्द्रिय, indriya) signifie “organe”. C’est ce qui donne la vibration initiale à chaque pensée, parole & acte que nous faisons. Il envoie l’élément d’akasha. 
  1. Paniindriya (l’organ de préhension)Pani (पाणि, pāṇi) signifie “main” ou “mains”. C’est la capacité de saisir, de tenir et d’appréhender quelque chose. C’est ce qui permet de se focaliser sur un objet et mettre l’élément de feu dedans. 
  2. Padaindriya (l’organe de la mouvement)Pada (पद, pada) signifie “pied”. C’est la faculté de mouvement, lié à l’élément d’air. C’est ce qui mettra en mouvement la vibration initiale (par exemple une pensée particulière)
  3. Payvindriya (l’organe d’évacuation)Payu (पायु, pāyu) signifie “anus” ou “excrétion”. C’est la capacité d’évacuation, lié à l’élément de la terre. C’est grâce à cette faculté que l’action/parole finale va se manifester dans son forme finale. 
  4. Upasthendriya (l’organe de reproduction) Upastha (उपस्थ, upastha) signifie “organe de plaisir” ou “siège du désir”. C’est la faculté de reproduction, lié à l’élément de l’eau, qui va permettre la reproduction dans tous les formes (par exemple, reproduire la vibration initiale d’une pensée)

Tanmatra

Les tanmatra (तन्मात्र, tanmātra) sont les cinq qualités subtiles de la matière qui constituent la base de toutes nos expériences sensorielles et de la création des éléments matériels. En sanskrit, tan (तन्, tan) signifie “cela” ou “cette essence” et matra (मात्र, mātra) signifie “mesure” ou “quantité”. Tanmatra peut donc se traduire par “essence subtile” ou “qualité essentielle”. Ce sont les énergies subtiles, invisibles à l’œil nu, qui permettent la perception sensorielle (comme le son, la texture, la couleur, etc.) et qui, par leur combinaison, génèrent les bhuta (les cinq éléments matériels).

Contrairement aux organes physiques (comme les yeux ou les oreilles), les tanmatra sont les énergies & matière fondamentales qui préexistent à la matière brute et au corps. Ce sont les empreintes énergétiques de chaque sensation, présentes même sans le support physique.

Les 5 tanmatra et leur étymologie

  1. Shabda (l’essence subtile du son) – (शब्द, śabda) signifie “son” ou “vibration”.
  1. Sparsha (l’essence subtile du toucher) – (स्पर्श, sparśa) signifie “toucher” ou “contact”.
  2. Rupa (l’essence subtile de la forme et de la couleur) – (रूप, rūpa) signifie “forme” ou “apparence”.
  3. Rasa (l’essence subtile du goût) – (रस, rasa) signifie “saveur” ou “essence”.
  4. Gandha (l’essence subtile de l’odeur) – (गन्ध, gandha) signifie “odeur” ou “parfum”.

Comment les tanmatra interagissent

Les tanmatra représentent les formes les plus subtiles qui permettent la perception de prakriti. Lorsqu’ils interagissent entre eux, ils forment les bhuta (les cinq éléments physiques : terre, eau, feu, air et éther), créant ainsi le monde matériel que nous connaissons. Par exemple, shabda est associé à l’éther (akasha), sparsha à l’air (vayu), rupa au feu (agni), rasa à l’eau (jala), et gandha à la terre (prithvi).

Ces combinaisons permettent aux tanmatra de générer des perceptions tangibles (comme la chaleur ou la texture d’un objet) et de donner naissance aux structures physiques de l’univers (comme les montagnes, les rivières et les corps physiques). Ainsi, les tanmatra sont les ponts entre le monde subtil de l’énergie et le monde matériel de la forme, reliant l’invisible au visible.

Bhuta

Les bhuta (भूत, bhūta) sont les cinq éléments physiques ou grossiers qui forment la matière tangible dans l’univers selon la philosophie du Samkhya et de Yoga. En sanskrit, bhuta signifie “ce qui est devenu” ou “ce qui a été manifesté”. Ils sont créés à partir des tanmatra (les essences subtiles de perception) et représentent la transformation de l’énergie subtile en matière concrète. Les bhuta constituent la base de tout ce qui est matériel — notre corps, les objets, la nature — et forment les éléments de la création que nous expérimentons à travers nos sens.

Pancha mahabhuta : Les éléments qui nous construisent

Les 5 bhuta et leur étymologie

  1. Akasha (Ether) – (आकाश, ākāśa) signifie “espace” ou “éther”. C’est l’élément le plus subtil. Akasha est associé au tanmatra shabda (son) et est l’espace dans lequel les autres éléments peuvent se manifester. Il est omniprésent et constitue le substrat de tous les autres éléments. Sans akasha, aucune forme ou vibration ne peut exister.
  1. Vayu (Air) – (वायु, vāyu) signifie “air” ou “vent”. Vayu est lié au tanmatra sparsha (toucher) et est l’élément du mouvement et de la légèreté. Il permet le transfert de l’énergie et de l’information dans le corps et l’univers.
  2. Tej (Feu) – (तेज, tej) signifie “feu” ou “chaleur”. Tej est associé au tanmatra rupa (forme et couleur) et représente la transformation, la lumière et la digestion.
  3. Ap (Eau) – (अप्, Ap) signifie “eau” ou “liquide”. Ap est lié au tanmatra rasa (goût) et représente la fluidité, la cohésion et l’adaptabilité. C’est l’élément qui relie et nourrit, apportant l’hydratation nécessaire à la vie.
  4. Prithvi (Terre) – (पृथ्वी, pṛthvī) signifie “terre” ou “solidité”. Prithvi est associé au tanmatra gandha (odeur) et est l’élément de la stabilité, de la structure et de la solidité. C’est ce qui donne forme et support à toute chose.

Bhuta et expérience humaine

Les bhuta forment la base de nos corps physiques et de toutes les structures matérielles que nous percevons.

Comprendre les bhuta et leur interaction permet de mieux percevoir comment notre corps, notre esprit et l’univers sont en constante interaction et transformation, offrant ainsi une compréhension plus profonde de la nature et de notre propre constitution.

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  • Ce cours est très intéressant ,il me permet d’approfondir ma connaissance de purusha et prakriti . J’attends le prochain cours les doshas peut-être
    Merci

  • Merci beaucoup de cette explication, très claire, à lire et écouter plusieurs fois. Pascale

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