Vous avez souvent des problèmes digestifs ? Vous vous sentez fréquemment manquer d’énergie ? Ou peut-être vous avez du mal à accepter vos émotions ? Parlons aujourd’hui d’un concept essentiel dans Yoga et Ayurveda : agni ou le feu digestif.
Le feu digestif nous aide non seulement à bien digérer ce que nous mangeons, mais aussi à assimiler ce que nous expérimentons dans la vie… mais il est aussi la clé pour les vraies transformations profondes.
Prenons d’abord le temps de comprendre ce qu’est agni. Et ensuite, parlons des différents feux qui sont présents dans le corps et le mental. Et finalement, comment assurer que ces feux restent forts et nous gardent en bonne santé physique et mentale, tout en nous aidant à progresser dans la voie de Yoga.
Que veut dire agni
Le mot “agni” trouve ses racines dans le mot “aj” que l’on peut voir comme “ce qui conduit, ce qui propulse”. Agni est aussi vu comme un des premiers principes du cosmos quand il s’est manifesté – et d’ailleurs une des énergies primaires qui a permis l’évolution du cosmos. D’ailleurs même à notre naissance – ou plus précisément au moment de la conception – agni, dans sa forme subtile, joue un rôle primordial !
Dans le contexte de Yoga et Ayurveda, on peut le traduire comme le “feu digestif”, qui est effectivement un des rôles d’agni. Mais on ne parle pas seulement de la digestion de la nourriture ! Mais aussi de nos émotions. De nos expériences. De ce que nous lisons, écoutons et vivons.
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Pourquoi les agni sont importants ?
Quand on mange une pomme ou n’importe quel autre aliment, le corps ne peut pas le digérer directement. D’abord, il faut qu’il puisse le convertir dans quelque chose qui peut être assimilé par les différentes tissus du corps (les muscles, les os, les organes).
Cette transformation (de quelque chose de brut ou grossier vers quelque chose de plus subtil et prêt à être assimilé) est le rôle principal d’agni dans le corps.
Mais ça ne s’arrête pas à la nourriture. Par exemple, vous venez de recevoir énormément de travail. Si les agni internes sont forts, ils vont décomposer ce travail en petits morceaux, et votre esprit arrivera à tout faire étape par étape.
À l’inverse, si ces feux internes sont faibles ou peu efficaces, vous allez juste voir un gros bloc de travail, commencez à vous stresser, vous sentir dépassé, etc.
Ce même processus est aussi valide pour les émotions ou les événements de la vie qui incitent des émotions fortes. Quand les feux internes sont forts, on arrive à accepter les situations difficiles, les fortes émotions, sans pour autant être sous leur emprise. Mais quand ces feux sont faibles, on a beaucoup de mal à accepter les émotions et les situations difficiles. Souvent, ça résulte dans les émotions comme la colère, la jalousie, ou encore la déprime totale.
Combien d’agni y a-t-il ?
Notre corps ne possède pas juste un agni. Il en possède plusieurs !
Si on ne parle que du corps physique, il existe 13 différents agni dans le corps physique.
D’abord il y a jatharagni, qui est le feu digestif principal qui s’occupe de la digestion de la nourriture. Ensuite, il y a les dhatu agni : les feux liés aux tissus du corps (comme les muscles, les os, etc.) Et finalement, il y a bhuta agni, les feux liés aux 5 éléments qui composent notre corps.
Mais nous ne sommes pas juste un corps physique ! D’après la philosophie de Yoga, le corps physique n’est que l’enveloppe la plus externe de l’organisme. Il y a aussi d’autres corps que l’on appelle les kosha ou les enveloppes du corps.
Et ces corps subtils possèdent encore d’autres feux, dont le principal est tejas (le feu subtil) qui s’occupe de nos émotions, notre capacité de compréhension profonde, et bien plus ! D’ailleurs, l’intégralité de notre santé mentale dépend directement de la force et l’efficacité de ce feu !
Jatharagni – le feu digestif principal
Avez-vous déjà senti une forte perte d’appétit ? Ou encore de sortir de table avec le ventre très lourd ? Ce sont des signes que le feu digestif principal ou jatharagni est soit trop faible, soit n’a pas réussi à faire son travail.
Le rôle de ce feu est de convertir ce que nous mangeons dans son essence – une essence qui peut être assimilée par notre corps. En Ayurveda, on appelle cette essence ahara rasa : l’essence de la nourriture.
Quand vous sentez une très grosse faim : c’est typiquement un signe que ce feu est très fort ! Tout comme quand on n’a pas faim, c’est un signe que ce feu est très faible.
Et quand on a très faim, mais on n’arrive pas à bien digérer ce que l’on mange, c’est un signe que ce feu est fort mais mal dirigé – c’est-à-dire, il va partout, et n’arrive pas à digérer la nourriture que l’on lui donne.
C’est un peu comme si on allumait le gaz pour cuisiner, mais après on met notre casserole à côté de la plaque !
Jatharagni est aussi le feu qui va agir comme le “directeur” des autres feux du corps physique (mais pas des corps subtils). Quand ce feu ne marche pas bien, notre corps à beaucoup de mal à assimiler la nourriture – même si on mange les meilleurs aliments de la planète ! Pareil, ça incite aussi à l’accumulation d’ama – les toxicités.
Dhatu agni – le feu digestif des tissus
Avez-vous déjà eu l’impression que vous mangez bien, vous digérez bien, mais le corps ne prend pas de muscles ! Tout est juste converti en graisse ?
Notre corps est composé de plusieurs tissus, que l’on appelle les dhatu dans Ayurveda. Il y a 7 tissus au total : le sang, les muscles, les os, la moelle spinale, etc. Et chaque tissu possède son propre feu, qui lui permet d’assimiler ce ahara rasa converti par le feu digestif principal. Dans notre exemple, où on mange bien, on digère bien, mais on ne prend pas de muscle, c’est typiquement un signe que le feu digestif lié aux tissus qui forment nos muscles est faible et n’arrive pas à assez assimiler.
Globalement, quand le feu digestif principal va bien, et on garde une hygiène de vie correcte, tous les feux des tissus marchent bien. Mais il est aussi possible que certains feux ne marchent pas bien : ce qui incitera à la perte de musculature, ou encore des problèmes de fertilité.
Bhuta agni – le feu digestif des mahabhuta
Maintenant, on commence à rentrer dans les parties plus subtiles du corps physique. Oui, même le grossier possède des subtilités !
Notre corps est composé de 5 éléments que l’on appelle les mahabhuta. Ces mahabhuta sont : akasha, air, feu, eau et terre. Mais il ne s’agit pas de la terre que l’on trouve dans le jardin ni de l’eau que l’on boit !
On est au niveau atomique – cellulaire pour faire plus simple. Chaque cellule est crée grâce à ces 5 éléments. Mais ces éléments qui composent les cellules ont aussi besoin de nutrition. C’est le rôle de bhuta agni, les feux élémentaires.
Je vais essayer de vous donner un exemple tangible. Mais ce sont des processus qui possèdent énormément de complexités donc ce n’est pas toujours facile.
Par exemple, durant une crise de panique, on a tendance à avoir une respiration qui devient très saccadée – on a même l’impression que l’on n’arrive plus à respirer. Il y a plusieurs choses qui jouent dedans, mais une des variables est justement ces bhuta agni – dont le dysfonctionnement commence à changer les réactions du corps titre élémentaire. L’effet est que l’on ressent cette panique dans chaque partie de notre être, comme si chaque cellule était en mode panique.
Pareil, les aggravations des dosha est typiquement un signe que quelque chose ne va pas dans les bhuta agni.
Comment travailler les feux digestifs grossiers ?
Avant de parler des feux plus subtils, qui sont plus difficiles à appréhender, parlons de comment s’occuper des feux grossiers.
Mais avant tout, j’aimerais spécifier que s’il y a des maladies manifestes, ou si le feu digestif (jatharagni), est vraiment trop faible, alors il est important de consulter un médecin. Cet article ne peut pas remplacer un avis médical, car le corps est d’une grande complexité.
S’il n’y a pas de grave problèmes manifestes, alors on peut améliorer l’intégralité de nos feux digestifs en suivant les consignes suivantes :
- Avoir une pratique physique régulière et complète qui combine le renforcement, la mobilité et la souplesse.
- Pratique des asana de Yoga faite en conscience du souffle, avec l’ajout des techniques des bandha (verrous) et drishti (le regard).
- Pratique des pranayama – notamment surya bhedhana, nadi shodhana, bhastrika et sama vrtti pranayama.
- Manger correctement mais uniquement quand on a faim. Et ne pas sauter les repas lorsque la faim apparait.
- Ne manger qu’à 3/4 de sa faim et laisser la place à la digestion.
- Un sommeil suffisant et reposant mais sans trop dormir (à noter ; les besoins de sommeil de chaque corps sont différents).
- Eviter les siestes (sauf en été) et surtout éviter les siestes tout de suite après les repas.
- Ne pas être sur-mené tout le temps (le stress est un facteur important qui peut baisser les feux digestifs).
Tant que l’on intègre ces aspects dans notre quotidien, l’intégralité des feux digestif grossiers fonctionneront correctement et efficacement.
Tejas – le feu digestif subtil
Mais nous ne sommes pas qu’un corps physique ! Si ce sont les feux digestifs grossiers qui affectent directement notre santé physique, notre santé mentale dépend des agni plus subtils. Il y a plusieurs feux qui sont présents à la fois dans notre corps énergétique, notre corps du mental et notre corps de la sagesse (à lire : les 5 kosha). Mais le feu subtil principal est tejas, et c’est lui qui affecte l’efficacité des autres feux.
Tejas affecte directement notre capacité de cognition, action mais aussi compréhension, notamment du domaine du subtil. Mais cela a aussi des effets très tangibles.
Par exemple, lorsque l’on se sent complètement submergé : c’est typiquement un signe que tejas n’est pas assez efficace ou est devenu trop faible. De même derrière les problèmes comme l’anxiété, il y a un fort affaiblissement de tejas. La plupart des émotions négatives, comme la colère, la jalousie, l’envie de tout contrôler, etc. trouvent leur origine dans le dysfonctionnement de tejas, qui, pour une raison ou une autre, est devenu trop faible.
À l’inverse, quand tejas fonctionne correctement, l’être ressent une forte harmonie, comme une profonde paix intérieure, et cela prévient l’intégralité des problèmes liés à la santé mentale.
Comment travailler tejas ?
Parmi tous les feux digestif, tejas occupe une place spéciale. C’est le feu central pour tout avancement dans la voie de Yoga. Une vaste majorité des pratiques traditionnelles étaient faites pour augmenter tejas. Typiquement, une pratique qui augmente tejas contient :
- L’intégration des yamas et des niyamas dans notre quotidien
- L’étude et l’application de la philosophie de Yoga
- L’apprentissage de l’art de la méditation et de la contemplation
- Travailler la concentration sans effort, et éviter la dispersion de l’esprit
- La pratique des pranayama avec les bandha et les mantra
- Le chant des mantra comme Gayatri Mantra
Résumé
La plupart du temps, quand on pense à Ayurveda, on a tendance à s’arrêter aux dosha. Mais s’occuper des feux digestifs, ces flammes qui nous animent, est tout aussi important. Tant que ces feux sont forts, efficaces et font leur travail correctement, ça nous aide à rester en bonne santé physique et mentale.
J’espère alors que cet article vous aura aider à un peu mieux pénétrer les mystères d’agni, ces feux digestifs qui nous aident à assimiler tout ce que nous vivons !
Bonjour,
Merci pour cet exposé sur les Agnis. Pourrait-on en savoir plus sur ces profils non adaptés aux jeûnes.
Merci,
Anne
Bonjour Anne. Toutes mes excuses pour cette réponse tardive. Oui, je vais écrire un article dessus.
Merci pour cet article très intéressant ! Il est vrai que j’avais tendance à ne penser qu’à l’aspect “digestion des aliments” mais les émotions ont aussi besoin d’être digérées ! Cela m’ouvre de nouvelles perspectives… 🙂
Merci pour cet article si intéressant et très clair . Je comprend mieux les subtilités de tous ces 🔥 .
🙌🏼
Merci Rachel 🙏🏾